Le Blogue d'Igor

"Heureux ceux qui se regardent avec humour car ils n'ont pas fini de rigoler ..." Lao Tseu

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lundi 11 août 2008

Sur la piste aux étoiles : Bilbao, le musée Guggenheim et les alentours

Capitale de la province de Biscaye, importante ville industrielle et commerçante mais en déclin dans les années 60 à 80, Bilbao connaît, depuis les années 90, un dynamisme nouveau qui se marque dans le paysage urbain par des réalisations puissantes et originales comme le musée Guggenheim conçu par le génial architecte Franck O. Gehry, qui a lui seul draîne les foules, la passerelle Pedro Arrupe, ressemblant à un gigantesque saurien, la Promenade de la mémoire, cet itinéraire de sculptures en plein air.


Bref aperçu en photos de ce quartier de l'Abandoibarra qui était récemment encore une zone industrielle en déshérence suite à la faillite des chantiers navals. L'intérieur du musée abrite la collection permanente dont l'aspect le plus spectaculaire est la réalisation de Richard Serra La matière du temps formée de gigantesque tôles d'acier aux surfaces complexes entre lesquelles on se promène tout en passant la main sur les patines d'oxydation aux couleurs et textures variées.
 
Lors de notre visite on trouvait aussi deux expositions temporaires : l'un des installations de Juan Muñoz faites de personnages souvent nombreux et représentés avec un réalisme troublant, l'autre d'objets liés au surréalisme et touchant à la peinture, la sculpture, la mode (robes extraordinaires d'Elsa Schiaparelli), la joaillerie .... ce qui rappelle l'engagement très fort de Peggy Guggenheim, fondatrice des musées Guggenheim, aux côtés des surréalistes.

Musée Guggenheim
Avda Abandoibarra, 2
48001 Bilbao (Vizcaya)
fermé lundi (sauf juillet-août)
site Internet


Merci à Catherine et Alain Houssat pour les photos de ce billet

mercredi 11 juin 2008

À Paris en mai, de ci, de là (2ème épisode)

Vendredi 23 mai
Le jour suivant, je débarque à Belleville, mon quartier d'enfance. J'arpente le boul. de la Villette et la rue du fbg. du Temple à la recherche d'un pot de brandade de Nîmes dont j'ai besoin pour cuisiner le soir. Mission impossible : cette préparation est inconnue alors que les produits chinois et maghrébins sont disponibles en surabondance. Je suis frappé par l'absence d'une poissonnerie dans ce quartier très peuplé à cheval sur quatre arrondissements. Je finis par dénicher ce que je cherche au Monoprix de la rue du fbg. du Temple.

Je poursuis mon chemin pour retrouver les copains de lycée pour un de ces repas que nous faisons ensemble de temps à autre. J'ai proposé de nous retrouver au Chateaubriand au 129, av. Parmentier dont je vous ai déjà parlé dans un billet antérieur (voir le billet du 29/04/2008 : Trois bistrots en mars-avril à Paris). Arrivé un peu en avance, je flâne et je déniche sur le trottoir d'en face un petit caviste à l'enseigne de « La cave du Daron » qui a en vitrine une bouteille du Mas des Brousses, domaine de Puechabon bien connu des œnophiles de Montpellier. Cela me décide à entrer et à parler un peu avec le jeune caviste qui a créé ce lieu en 2006. Il propose des vins bien choisis à prix abordables ainsi qu'un petite restauration à base de « planches » de charcuterie et de fromages (voir le site). Une idée pour marquer une pause apéro avant d'aller déjeuner ou dîner au Chateaubriand en face.

Je traverse donc et retrouve la petite bande des anciens du lycée Voltaire. Nous choisissons la formule du midi qui, pour 16 euros, propose des plats simples et parfaitement cuisinés. La carte des vins montre à l'évidence une recherche de cuvées originales parmi des vignerons au style affirmé, souvent produits en bio. Seul reproche, il est impossible de trouver une bouteille à moins de 27 euros, la plupart se situant entre 30 et 40 euros. Je choisis la cuvée Isidore 2005 de Didier Chaffardon en Anjou, un chenin magnifique de minéralité et à la fine oxydation qui fera merveille avec le saumon sur lit de mangue et citron.

Retour à la case expo après ce repas : j'ai envie de voir la rétrospective de l' œuvre de Louise Bourgeois au Centre Pompidou mais je me casse le nez sur la fermeture du Centre pour cause de grève des agents du nettoyage. Je vais donc au musée Guimet pour la sublime exposition des estampes d'Hokusai qui vient de commencer (Hokusai, l'affolé de son art). Je la vois dans de bonnes conditions car la foule n'est pas encore là.

Samedi 24 mai
Le jour suivant je suis invité à un buffet chez des amis, non loin du château de Vincennes pour fêter la naissance de leur petite fille Éva. La visite à la boutique créée par deux jeunes chocolatiers, Julie et Fabrice Herviou, m'a été fortement recommandée et j'y fais un petit arrêt au sortir du RER Vincennes. Le petit coffret de chocolats assortis sera apprécié quelques jours plus tard par des connaisseurs (et connaisseuses) à Montpellier pour la grande qualité des chocolats et des ganaches. Encore une adresse à retenir. Pour en savoir plus, vous pouvez aller voir le site de l'ACCP (les Amants du chocolat de la Couronne parisienne) où une dégustation des chocolats Herviou est commentée.

En ce samedi soir, j'ai rendez-vous avec des amis pour tester un restaurant japonais dont j'avais lu l'éloge dans une chronique du Monde. On sait qu'une véritable déferlante de restaurants « japonais » s'est abattue sur Paris (600 enseignes) et sur la Province depuis quelques années. Tenus souvent par des Chinois ou des Coréens, ils surfent sur la vague du préjugé favorable à la cuisine du Pays du Soleil levant réputée saine et facile à digérer. Il est difficile pour le profane de détecter ce qui est vraiment japonais de ce qui ne l'est pas ; en cas de doute on peut consulter le site du Comité d'évaluation de la cuisine japonaise.

Ainsi renseigné j'avais donc choisi d'aller chez Wada dans le quartier des Ternes, près de l'Arc de Triomphe. C'est un petit restaurant qui ne paye pas de mine tenu par Hideo Yamaguchi, fils d'un pêcheur de Nagasaki, et qui ressemble beaucoup pour l'énergie concentrée qu'il dégage et son peu de loquacité au mythique acteur-réalisateur Kitano Takeshi. Le patron est seul en cuisine et en salle et prépare au moment même les sushis et sashimis servis avec des légumes marinés, croquants et parfumés. Le menu dégustation à 61 euros qui se termine par un pavé de saumon poëlé servi avec des lanières de coloquinte est presque trop abondant. Repas accompagné d'un saké délicat mais cher, 29 euros pour une petite bouteille, ce qui est excessif. On notera que le quartier n'est pas dénué de restaurants attractifs, à commencer par le restaurant Graindorge situé tout près de Wada dans la même rue.
 
Dimanche 25 mai
Je prends le TGV de 9h20 pour retourner à Montpellier et arriver à temps pour la représentation de l'opéra à 15 h. Quelques petits regrets concernant des expositions que je n'ai pas pu voir pendant ce bref séjour :
- Camille Claudel, une femme, une artiste au musée Rodin
- Sophie Calle, Prenez soin de vous et Daumier à la BN, site Richelieu
- Alain Séchas, Rêve brisé au musée Bourdelle
- Saul Steinberg, Illuminations à la Fondation Cartier-Bresson
- Bronzes du Luristan, énigmes de l'Iran ancien au musée Cernuschi

La cave du Daron
140, av. Parmentier
75011 Paris
01 48 06 21 84

Chocolats Herviou
42, rue de Montreuil
94300 Vincennes
01 43 74 26 54
RER Vincennes  ou métro Château de Vincennes

Wada
19, rue de l'Arc de Triomphe
75017 Paris
01 44 09 79 19
métro Argentine ou Ternes
fermé dimanche

À Paris en mai, de ci, de là (1er épisode)

Entre amis, restos et expos, les sollicitations n'ont pas manqué en ces quelques jours de fin mai à Paris. Bref aperçu.

Mercredi 21 mai
La famille Ceccaldi, coutellerie d'art à Porticcio en Corse, a ouvert une boutique atelier au 15, rue Racine (entre le boul. Saint-Michel et la rue de l'École de médecine). C'est une grande émotion que de regarder ou de prendre en main aussi bien un simple couteau de cuisine à manche en racine de bruyère et lame d'acier au carbone qu'un très raffiné couteau pliant liner lock à lame et mitre en damas et manche en ébène. Accueil attentif de la part de Sylvestre et Simon Ceccaldi. Le site Internet  est de qualité.

Dans la même rue Racine, au n°3 se trouve le Bouillon Racine, véritable institution au décor Art nouveau fulgurant rénové en 1996 par les Compagnons du Devoir (voir le site) et qui est un survivant des nombreux « bouillons » populaires ou bourgeois qui fleurissaient à Paris fin XIXème-début XXème siècle. Au même numéro se trouve le plus récent Bouillon des Colonies qui mêle des atmosphères asiatiques et africaines dans la décoration et présente une carte où des spécialités diverses allant du Proche-Orient à l'Indochine en passant par Tahiti sans oublier l'Inde se côtoient. Un menu « découverte » à 24 euros (1 E, 1 P, 1 D) permet de se prendre pour un explorateur et quelques vins au verre (dont un chenin d'Afrique du Sud, un peu mou) complètent l'offre. Ce soir-là les choix se portèrent d'une part sur l'assiette Afrique Orient (en fait des mézés dont certains manquaient de conviction dans la cuisson et l'assaisonnement) et d'autre part des vapeurs cochinchinoises telles qu'on en trouve dans tout honnête restaurant sino-vietnamien. La christophine farcie au crabe que j'avais choisie manquait un peu de présence aromatique cependant que la canette rôtie au combava et pomme purée au sésame plaisait à l'amie avec qui je dînais. En dessert, une excellente crème brûlée et un fromage blanc fouetté baptisé « blanc manger » complèterent ce repas honorable sans plus où les énoncés des plats l'emportent sur la réalité de l'assiette et où les intentions proclamées dans le site Internet ne se concrétisent pas vraiment. Service plutôt désagréable ce soir-là. Addition raisonnable (33 euros vin compris par personne).

Dans ce désert en terme de commerces de bouche (épiceries, boucheries charcuteries, fromageries, poissonneries ...) que constitue maintenant le quartier Saint-Michel/Saint-Germain/Odéon, on se réjouira de l'apparition récente de deux établissements : un Monoprix avec un rayon alimentation conséquent et une offre en vins de bon calibre (à l'angle du boul. Saint-Michel et de la rue Pierre Sarrazin, face au musée de Cluny) et une boutique du charcutier-traiteur basque Pierre Oteiza (au 18, boul. Saint-Michel, ouvert tlj sauf dimanche matin, voir le site) que connaissent bien les habitués du bistrot à vins le Trinque-Fougasse à Montpellier et où on peut s'initier aux charmes de l'Iroulégui.

Jeudi 22 mai
Profitant du fonctionnement quasi normal des bus en ce jour d'action syndicale je me lance dans un petit marathon de visites d'expositions :
- Lovis Corinth au musée d'Orsay, ou comment les Français ont l'art de passer à côté de peintres important comme celui-ci qui était le maillon manquant entre l'académisme du XIXème siècle et l'expressionnisme
Goya, graveur au Petit Palais, l'exposition est exhaustive et fait le point sur les dernières attributions de tirages réalisés du vivant de Goya ; j'adore ce lieu depuis sa rénovation très réussie et le restaurant ne manque pas de charme cependant que le personnel y est tout à fait aimable
– Incursion dans la nef du Grand Palais pour voir l'installation de Serra dans le cadre de Monumenta : cinq immense plaques d'acier dressées comme des totems ou des menhirs
La figuration narrative aux galeries du Grand Palais, rétrospective de ce mouvement pictural qui marqua dans les années 60 et début 70 le retour à la figuration après la période où l'abstraction tenait le haut du pavé cependant que l'École de Paris continuait sur sa lancée en voie d'épuisement.

La peinture donnant faim nous allons en soirée avec une amie au restaurant « Chez René » et nous y retrouvons une autre amie familière des lieux. La maison a été créée en 1957 sous son nom actuel qu'elle a gardé bien que son patron ait récemment cessé son activité et faisait suite à un autre restaurant établi en 1896. Accueil affable de la part du maître d'hôtel et des serveurs en tablier blanc et gilet noir. Cuisine franche et loyale entre bistrot et brasserie, décor assorti avec banquettes, miroirs et barres métalliques. Je ne détaillerai pas la carte et vous parlerai simplement de la très goûteuse blanquette de veau que nous avons choisie ce soir-là et que nous avons accompagnée d'un Côtes du Ventoux, Traverses 2005, de chez Jaboulet au joli fruité sur la prune cuite. Nous avions commencé le repas avec une salade de viande de bœuf succulente et abondante qui permit de commencer le repas avec un Sancerre, Chatillet 2006, de chez Balland-Chapuis d'une belle fraîcheur sur les fruits blancs.

Bouillon des Colonies
3, rue Racine
75006 Paris
01 44 32 15 64  et site Internet
ouvert tlj  

Coutellerie Ceccaldi
15, rue Racine 75006 Paris
01 46 33 87 20


Chez René

14, boul. Saint-Germain 75005 Paris
01 43 54 30 23
fermé dimanche et lundi


(à suivre)

jeudi 20 mars 2008

Une bordée de noms pour saluer le printemps

Ce ne sont pas des injures passées par la bouche du capitaine Haddock (il existe des sites pour cela) mais des noms de plantes à fleur. La nature est belle et l'imagination lexicale des hommes sans limite.

Phalangère à fleur de lis
Ornithogale en ombelle
Rhinante du midi
Adonis de printemps
Lotier corniculé
Hippocrépide à toupet
Genêt poilu
Anthyllide vulnéraire
Carline à feuile d'acanthe
Épervière piloselle
Thymélée des Alpes ......

 

mercredi 23 mai 2007

Nom de D'zeuze, c'était pas un moule à gaufre

Le peintre Georges Dezeuze était un professeur très respecté de l’Ecole des Beaux-arts de Montpellier de 1945 à 1972, à l’époque où l’on persévérait dans la grande tradition de l’Académie du XIXème siècle. Décédé en 2004, à l’âge de 99 ans, il fut témoin et acteur à Montpellier d’une époque particulièrement brillante pour les arts. Une pléiade de talents — Germaine Richier, Paul Guery, Jean Milhau, Gabriel Couderc, Camille Descossy ou Albert Dubout pour ne citer qu’eux — fréquenta avec lui l’école des Beaux-arts de Montpellier de 1923 à 1927. georges dezeuze photo Didier LECLERCContournant habilement les acquis de l’impressionnisme, des nabis, des fauves et des cubistes, Dezeuze affirmait son attachement à la tradition, au beau métier, au travail sur le motif et le paysage. Classique, humaniste dans l’âme, il ne se souciait guère d’être original. Il puisait son inspiration dans la richesse du noble terroir du Languedoc, qu’il a peint avec amour tout au long de sa vie.

À travers cette exposition de leurs diverses productions, certains de ses élèves des promotions 1955-1965 lui rendent aujourd’hui un émouvant hommage. Leurs peintures et sculptures s’articulent dans la Nef du Carré Sainte Anne autour d’une peinture à l’huile du Maître (Nature morte au verre de vin, 1933). J'ai visité l'exposition avec René Ferris qui en a assuré le commissariat et qui a été son élève dans les années 60. Je vous ai déjà parlé de René qui expose régulièrement ses magnifiques gouaches à la galerie de L'Ancien Courrier (tout dernièrement sa série des Mas dans les vignes a impressionné les visiteurs de la galerie).

Ce qui m'a frappé, c'est la diversité des chemins artistiques suivis par ces femmes et ces hommes à l'issue de leur apprentissage : de l'abstraction à la figuration, du colorisme au minimalisme. Seul point commun, au départ, une bonne maîtrise du dessin qui se manifeste dans les travaux d'école exposés sur le mur du fond. Puis chacun suit sa voie, sa vie. Nul doute que Georges Dezeuze n'était pas un moule à gaufre et qu'il respectait la personnalité de ses élèves. De manière un peu arbitraire, je citerai les noms de quelques artistes que j'ai noté lors de ma visite : Yvan Chazotte, Jean-François Vivares, Christian Boulot, Alain Claus, Constant Idoux. À votre tour d'aller voir qui vous préférerez.

La photo de Georges Dezeuze dans son atelier est de Didier Leclerc, photohèque Atelier N 89



Artistes exposés : Jean Azéma, Anne Barres, Vincent Bioulès, Alain Bonicel, Christian Boulot, Champieux, Yvan Chazotte, Alain Claus, Lucien Delmas, Georges Dezeuze, Daniel Dezeuze, René Ferris, Jeanne Gérardin, Anne-Marie Hennequin, Constant Idoux, Bernard Lentheric, Christiane Lentheric Wild, Simone Maluski Viala, Marie de Melgueil, Philippe Pradalie, Cécile Pradalie Verny, David Sol, Trimon, Pierre Vachin, Pierre Valery, Van der Spelden, Claude Viallat, Henriette Viallat, Jean-François Vivares.

Ouvert du mardi au dimanche inclus, de 13 h à 18 h Entrée libre
Carré Sainte Anne 2, rue Philippy - 34000 Montpellier

samedi 21 avril 2007

Arles au rendez-vous

Les Arlésiennes ont la réputation de ne pas être là où on les attend. Mais ce jour-là, en cette fin mars, le soleil, un vent léger, un restaurant agréable, un musée tranquille et une belle exposition étaient au rendez-vous.
Le musée Réattu est accueillant, c'est un beau bâtiment de style médiéval adouci de Renaissance, son fonds permanent tourne autour des œuvres de Jacques Réattu (G.P. de Rome en 1791, en pleine vogue de l'Antique). Comme tous les peintres de cette époque, il a d'abord été formé au dessin et c'est ce que nous avons préféré, même si les huiles sont bien composées mais n'ont pas cette belle lumière qu'il sait accrocher dans ses œuvres sur papier. Le musée possède un bel ensemble d'œuvres de Picasso qui en a fait don à la ville où il venait pour les corridas et un fonds de photos important que nous n'avons pas pu voir car les murs étaient occupés par une exposition temporaire des travaux d'un contemporain, Albert Ayme, où nous avons particulièrement remarqué les effets intéressants obtenus par découpage au scalpel de couches superposées de feuilles de papier carton : effets d'entrelacs et de courbes de niveau, une énorme activité tout au long de l'année 1962 lorsqu'il a mis au point cette technique qu'il a baptisée « reliefs soustractifs ». Vu aussi sa « Triple suite en jaune à la gloire de Vincent Van Gogh », géométries rigoureuses de bandes colorées aux nuances presque imperceptibles.
L'éditeur Actes Sud possède tout un pâté de maison au bord du Rhône qui en fait un vrai centre culturel privé : une grande librairie, un lieu de concert et d'exposition (la chapelle du Méjan), un cinéma et un restaurant (l'Entrevue). Après sa belle exposition au musée Fleury à Lodève en février de cette année, André-Pierre Arnal persiste et signe. La chapelle du Méjan convient parfaitement à ses grands formats aux chatoiements chromatiques complexes regroupés sous le titre de « Frontières » qui fait allusion, peut-être, à sa manière de traiter (retraiter) les cartes routières ou d'état-major et d'en obtenir des pays imaginaires aux limites perturbées et à la géologie apparente. Vous aviez jusqu'au 15 avril pour vous immerger dans ce bain vibrant de couleurs (entrée libre).
Dans le domaine artistique, je veux aussi vous parler de l'Atelier de Jean-Luc Rabanel. Soit une rue piétonne près de l'hôtel de ville, soit une salle rectangulaire pouvant accueillir une trentaine de convives : murs blancs, banquettes et tables noires, plinthes hautes et champs des murs bas de séparation des espaces d'un rouge entre corail et sang. On peut aussi manger à la terrasse. Le choix est entre le menu Création (37 euros) et le menu Émotion (55 euros), vous ne pourrez pas les détailler par écrit car c'est selon le marché et l'inspiration du chef. Dans le premier une dizaine de petites préparations savoureuses, dans le second une quinzaine de préparations. Commence alors un ballet bien réglé et au rythme soutenu animé par Guillaume et Christelle.
L'énumération complète de ce qui nous fût servi dépasse le cadre de ce billet et serait un peu vaine puisque vous ne trouverez pas les mêmes plats une autre fois.

À titre d'exemples comme entrées : une sardine fraîche sur un sablé au parmesan accompagné d'un lait glacé à la cacahuète et de sauce escabèche ; asperges blanches placées verticalement dans une verrine ovale avec une émulsion de bouillon de légumes à la pistache et gelée d'orange maltaise ; une raviole soufflée avec tomate confite et oignon doux, bouillon de graine sauvages et copeaux de parmesan dans un petit bol en porcelaine. Pour plat central : du saumon sauvage à la plancha avec une garniture de petits légumes ou une petite côtelette d'agneau avec topinambours, poireaux, fèves au jus de réglisse et ail confit. En desserts : sur une purée de patate douce, une mousse de noix de coco avec une tuile de chocolat ou une gelée de framboises cuites aux épices au fond d'une verrine surmontée d'un lait glacé au thym, citron et basilic ou encore une tartelette déstructurée avec la pâte à tarte au fond d'un verre surmontée de gelée de citron recouverte d'une mousse à l'orange. En bref, des présentations inattendues et raffinées, des saveurs et des textures complexes d'une parfaite justesse de goûts, de cuissons et d'arômes. Bravo l'artiste. La carte des vins est assez simple, issus pour la plupart de domaines travaillant en bio. Nous avions penché pour un Gigondas 2002 du domaine Montirius qui s'est bien adapté à la plupart des préparations qui nous furent servies (on peut opter pour une formule où les vins seront servis au verre selon le choix du sommelier, mais nous n'avons pas discuté des conditions). Avec les desserts, un verre de Rivesaltes ambré 2005 du château de Rey (Canet en Roussillon) a été le bienvenu.
L'atelier de Jean-Luc Rabanel
7, rue des Carmes
13200 ARLES
04 90 91 07 69
fermé lundi et mardi
site Internet assez décoiffant