Suite au billet du 3 août 2007 sur la poutargue, j'ai reçu un message de Philippe Reboul que j'avais rencontré au Salon du goût et des saveurs d'origine en avril dernier à Montpellier. Il est maintenant à Brisbane en Australie et il est passionné par la poutargue (ou boutargue) qu'il connaît très bien. Je ne résiste pas à l'envie de vous faire profiter de ses intéressantes remarques et précisions.

Bonjour Igor

Je suis ravi que tu aies parlé de la poutargue (ou boutargue) car je suis un passionné de ce produit extraordinaire. Et bien sûr toujours de mulet, pas de thon (pas mauvais mais bien bien moins bon ) ou de bonite  etc…Ici en Australie, comme tu t’en rappelles peut-être, j’ai démarré ma société de produits gastronomiques et me limite au caviar, aux truffes fraîches d’Europe ou d’Australie (eh oui, ils ont planté des truffières qui commencent à donner) au foie gras et … à la boutargue (bottarga en italien, karasumi en japonais). Ce qui est extraordinaire est que l’une des toute meilleure boutargue au monde est faite a Brisbane où j’habite !

Comme tu le sais peut-être la boutargue a été introduite au Japon il y a 300-400 ans et est devenue une spécialité gastronomique japonaise haut de gamme (ce n’est pas cadeau en France non plus). Les Japonais bien sûr poussent toujours l’art à son sommet et sont très exigeants. D’ailleurs ils ne consomment presque que la boutargue qu’ils font eux-mêmes …sauf celle de ce producteur de Brisbane qui est considérée au Japon comme meilleure que leurs produits locaux ! J’ai appris beaucoup sur la boutargue ces derniers temps : fabrication, grades de qualité etc.. très intéressant.

En Corse, où j’ai grandi, on la mange souvent tranchée finement à l’apéro. Mais en Italie, les pâtes à la boutargue (râpée ou en lamelle), c’est le grand classique . Il y a aussi d’autres recettes sympas : en salade (lamelle de boutargue, roquette/mâche, pignon, mozarella par ex.), avec des œufs brouillés, ou râpée sur des œufs a la coque avec un brin de persil sur le dessus ! Sinon, c’est un ingrédient magique pour les sauces : ça donne goût et structure ; par ex. sauce beurre/crème pour mettre sur des raviolis aux crevettes (faits maison évidemment) ou sur un filet de poisson ou une tranche d’espadon. Dans ce dernier cas je fais aussi infuser des graines de fenouil dans la crème qui bout….. Merci et bon appétit.

J’ai oublié de dire qu’il y a la boutargue fumée et la nature. Les puristes ou ceux qui aiment les goûts prononcés de poisson préfèrent la nature. La fumée a ses adeptes mais ça cache un peu trop le vrai goût de boutargue et développe parfois une petite amertume qui, lorsqu’elle est mangée à l’apéro peut rendre un vin blanc horrible à boire  alors qu’il sera délicieux sur de la boutargue nature.  Mieux vaut opter pour le pastis avec la boutargue fumée. 

Cordialement

Philippe Reboul